Atlas Social de Caen

De l'agglomération à la métropole ?

Des risques sociaux d’échec et de décrochage scolaire inégalement répartis dans l’unité urbaine de Caen

par Agnès Checcaglini, Patrice Caro et Laura Pauchard

planche publiée le 09 juillet 2024

Les jeunes en situation de décrochage scolaire, c’est-à-dire quittant le système scolaire sans diplôme autre que le brevet à la fin du collège, réduisent fortement et durablement leurs chances d’insertion professionnelle et d’emploi. Or, les risques de décrochage scolaire sont inégaux selon le lieu de résidence des jeunes. Mieux connaître ces inégalités de répartition spatiale de risques permet de cibler des actions de lutte contre le décrochage sur certains territoires.

Des quartiers centraux favorisés et des quartiers de la politique de la ville fragiles

1Dans l’Atlas des risques sociaux d’échec scolaire, paru en 2016, l’ensemble du territoire national a été divisé en grands types d’espaces selon les risques sociaux de décrochage. Parmi les causes multiples du décrochage scolaire, comment ces risques se répartissent-ils à l’échelle locale, au sein de l’unité urbaine de Caen ? Les communes et les quartiers de cette unité urbaine sont-ils affectés avec la même intensité ?

2Les quartiers (découpages en îlots Iris de l’Insee) des communes de Caen, Hérouville-Saint-Clair, Colombelles, Mondeville, Cormelles-le-Royal et Ifs, et les communes plus périphériques et moins peuplées, ont été regroupés en quatre grands types selon la proximité et/ou l’éloignement des valeurs de sept indicateurs. Ces indicateurs sont : le revenu fiscal par unité de consommation, le taux de chômage des 15-64 ans, la part des CDI parmi les salariés, la part des familles monoparentales parmi l’ensemble des familles, celle des familles de quatre enfants et plus parmi l’ensemble des familles, la part des résidences HLM parmi l’ensemble des résidences principales et, enfin, la part des ouvriers parmi les actifs de 15 à 64 ans.

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Crédits : Checcaglini A., Caro P., Pauchard L., Mellet C.

Une unité urbaine regroupe un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants. Dans le cas de Caen, l’unité rassemble 21 communes pour un total de 196 900 habitants (2016).

Figure 1 : Les inégalité de risques sociaux d’échecs scolaire dans l’unité urbaine.

3On différencie de cette manière des quartiers relevant des politiques de la ville cumulant toutes les fragilités (type 1), d’autres quartiers du centre de l’unité urbaine bénéficiant de sécurité économique et de soutien culturel (type 2), des périphéries résidentielles proches à l’ouest à garantie d’emploi (type 3), et des périphéries plus industrielles situées au sud et à l’est caractérisées par des disparités de conditions de vie (type 4).

4Les quartiers centraux (Château, Saint-Gilles, Saint-Nicolas, Jardin des plantes, etc.) apparaissent comme le lieu le plus favorisé socialement au regard des risques sociaux de décrochage (type 2 : revenu médian supérieur de 4 600 euros à la moyenne de l’unité urbaine, part des ouvriers parmi les actifs la plus faible). Certains quartiers se démarquent cependant par de faibles taux de poursuite d’études chez les 15-24 ans, et de plus forts taux de non diplômés, comme La Maladrerie ou les Coutures au nord-ouest de la commune de Caen, ou Sainte-Thérèse et Le Marais au sud-est. Ces exceptions rappellent le non déterminisme du décrochage ou de l’échec scolaire, avec la présence d’autres facteurs familiaux, scolaires ou politiques.

5Ce centre favorisé est ceinturé au nord-ouest, nord-est et au sud par un plus petit nombre de quartiers résidentiels planifiés relevant des politiques de la ville (ZAC et ZUP du Chemin vert, de La Guérinière, de La Grâce-de-Dieu, etc.), partageant un ancrage historique de leur paupérisation et une extrême concentration d’habitat social (type 1 : 70 % de HLM et 34 % de taux de chômage, soit le double de la moyenne pour l’unité urbaine). De nombreux quartiers relevant de ce type associent des taux élevés de non diplômés et de faibles taux de poursuites d’études, à l’exception de certains quartiers d’Hérouville-Saint-Clair moins paupérisés (Lebisey, Bourg et Montmorency nord, Belles portes).

Des communes résidentielles homogènes et favorisées à l’ouest de Caen

6Au-delà vers l’ouest, quasiment toutes les communes résidentielles pavillonnaires de classe moyenne s’agrègent dans le type 3 (Rots, Carpiquet, Bretteville-sur-Odon, etc.), en raison d’un faible développement du chômage et d’un taux record d’emploi à durée indéterminée (type 3 : 87,9 % de CDI parmi les salariés).

7En revanche, les périphéries industrielles du sud et de l’est à plus forte densité de cités ouvrières (Colombelles, Giberville, Ifs, Fleury-sur-Orne, etc.), sont moins favorisées en raison de conditions de vie plus hétérogènes (type 4 : parts d’ouvriers, de HLM et de familles nombreuses supérieures à la moyenne de l’unité urbaine). Le contraste est grand au sein de ce groupe puisque le taux de scolarisation varie de seulement 53 % dans certains quartiers de Colombelles (Le Plateau et l’Orne), à 85 % au Bourg et à Montmorency nord (Hérouville-Saint-Clair). Les différences sont tout aussi accentuées pour ce qui est du taux de non diplômés : de 18 % à la Folie Couvrechef Est (Caen) à 44 % au Centre de Colombelles.

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Crédits : Checcaglini A., Caro P., Pauchard L., Mellet C.

Figure 2 : Les non-diplômés de plus de 15 ans (à gauche)
et la poursuite d’études des 15-24 ans (à droite)

Pour citer ce document

Agnès Checcaglini, Patrice Caro et Laura Pauchard, 2024 : « Des risques sociaux d’échec et de décrochage scolaire inégalement répartis dans l’unité urbaine de Caen », in Atlas Social de Caen [En ligne], ISSN : 2779-654X, mis à jour le : 09/07/2024, URL : https://atlas-social-de-caen.fr:443/index.php?id=1254, DOI : https://doi.org/10.48649/asdc.1254.

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Économiste et ingénieure de recherche, Université de Caen Normandie, Centre d'Études et de REcherches sur les Qualifications (CEREQ) - centre associé au laboratoire Espaces et Sociétés (ESO)

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Cet atlas n'aurait jamais pu voir le jour sans le dynamisme, les exigences scientifiques et les grandes capacités d'organisation de Laura Pauchard, ingénieure d'études à ESO-Caen.
Entre 2019 et 2022, elle y a passé une très grande partie de son temps professionnel.

Laura nous a quittés le 18 août 2022 à 33 ans. Cet atlas lui est dédié.

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Résumé

Les jeunes en situation de décrochage scolaire, c’est-à-dire quittant le système scolaire sans diplôme autre que le brevet à la fin du collège, réduisent fortement et durablement leurs chances d’insertion professionnelle et d’emploi. Or, les risques de décrochage scolaire sont inégaux selon le lieu de résidence des jeunes. Mieux connaître ces inégalités de répartition spatiale de risques permet de cibler des actions de lutte contre le décrochage sur certains territoires.

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