Le vélo à Caen : d’une pratique de loisir à un véritable mode de déplacement quotidien ?
par Jean-Marc Fournier et Thomas Joly
Comme toutes les villes françaises, Caen essaie de favoriser la pratique des mobilités douces dans le cadre du modèle de la ville durable. Depuis plus de vingt ans, plusieurs initiatives ont été prises pour développer l’usage du vélo. Le contexte de l’épidémie du Covid-19 et la flambée du coût des énergies ont accéléré cette tendance puisqu’il est reconnu que, pour les petites distances en ville, le vélo est le véhicule le plus rapide, le moins cher et le moins polluant. Caen est-elle devenue une ville cyclable ?
L’échec d’un premier système de vélos partagés
1L’inauguration du premier tramway en 2002 amène à intégrer l’usage du vélo dans les politiques d’aménagement, avec la création de quelques pistes cyclables. Mais ce n’est qu’en mars 2008 qu’une étape est réellement franchie avec la création d’un réseau de 40 stations et 350 vélos en libre-service appelé V’eol. Un contrat de dix ans est signé avec le concessionnaire privé Clear Channel. Ce projet interfère avec le calendrier des élections municipales puisque l’inauguration du réseau est prévue seulement une semaine après le second tour les élections. Brigitte Le Brethon, alors maire de Caen et qui soutient fortement ce projet, ne sera cependant pas réélue.
2Dix ans plus tard, l’échec de ce système est évident : non seulement on compte très peu d’abonnés à ce réseau, mais encore le coût financier pour la municipalité est démesuré au regard des bénéfices. Le poids du vélo et le système d’accrochage font notamment l’objet de critiques. Cet échec est aussi celui d’un modèle emprunté à d’autres villes, appliqué trop rapidement et sans réflexion approfondie, ni adaptation aux spécificités urbaines et culturelles locales. Un nouveau système dénommé Vélolib le remplace en 2018. Géré par Twisto (groupe Kéolis), il ne compte plus que 230 vélos et 23 stations, mais il est possible de bénéficier de vélos à assistance électrique, ce qui constitue un service réellement différent.
Figure 1 : Circuler à vélo à Caen : les « points noirs ».
Carte : Girardin A.
La Fédération française des utilisateurs de bicyclette (Fub) organise des enquêtes pour évaluer la qualité de la circulation cyclable dans les villes françaises. Les usagers localisent les endroits qui leur paraissent les plus problématiques à vélo : « les points noirs » ici agrégés pour l’enquête de 2019.
Des problèmes de sécurité
3En parallèle aux systèmes de vélos partagés, se sont ouverts des commerces dédiés à la vente et à l’entretien des vélos. De plus, la maison du vélo, située proche de la gare Sncf, regroupe six associations, parmi lesquelles Velisol’ qui propose des ateliers d’aide à la réparation des vélos, ou encore l’association Dérailleurs, affiliée à la Fédération française des usagers de la bicyclette (Fub), et qui réalise des rapports d’évaluation détaillés des équipements cyclables à Caen la Mer.
4Caen étant une ville universitaire, le développement du vélo passe notamment par son usage par ses 27 000 étudiants. Nous avons réalisé en 2022 une enquête auprès d’environ 650 personnes de l’université de Caen Normandie. Elle montre tout d’abord que 16 % des enquêtés utilisent le vélo, ce qui est un chiffre peu élevé si on le compare à celui des universités du Nord de l’Europe. Pour ceux qui utilisent la bicyclette, les principaux motifs sont les suivants : gagner du temps, faire du sport, préserver l’environnement et se déplacer à faible coût. Pour ceux qui ne l’utilisent pas, les freins majeurs sont : habiter trop proche ou trop loin de l’Université, ne pas être à l’aise dans la circulation urbaine, ne pas disposer de lieu de stockage à domicile ou encore craindre d’arriver en sueur. L’existence de pentes ou les contraintes météorologiques ne sont que des éléments secondairement cités. Enfin, cette enquête fait surtout ressortir les problèmes de sécurité. Sont mentionnés de très nombreux risques d’accident (208), des agressions verbales (108), des accidents (73) et des vols (74). Ces derniers chiffres sont élevés quand on considère le nombre de répondants, et en sachant qu’un peu moins d’un tiers des enquêtés ne possède pas de vélo.
Photo : Jean-Marc Fournier
Un périphérique cyclable est en cours de construction pour compléter le maillage des voies cyclables.
5Caen est-elle finalement une ville cyclable ? Les lourds travaux d’aménagement réalisés en 2019 pour le deuxième tramway, une occasion historique pour intégrer des pistes cyclables dédiées, n’ont pas réellement intégré cette évolution. Si d’importants efforts ont été consentis ces dernières années pour améliorer les infrastructures, de nombreux tronçons du réseau restent dangereux, ce qui de fait limite la pratique.
Pour citer ce document
Jean-Marc Fournier et Thomas Joly, 2023 : « Le vélo à Caen : d’une pratique de loisir à un véritable mode de déplacement quotidien ? », in Atlas Social de Caen [En ligne], ISSN : 2779-654X, mis à jour le : 03/05/2023, URL : https://atlas-social-de-caen.fr:443/index.php?id=1174, DOI : https://doi.org/10.48649/asdc.1174.
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Comme toutes les villes françaises, Caen essaie de favoriser la pratique des mobilités douces dans le cadre du modèle de la ville durable. Depuis plus de vingt ans, plusieurs initiatives ont été prises pour développer l’usage du vélo. Le contexte de l’épidémie du Covid-19 et la flambée du coût des énergies ont accéléré cette tendance puisqu’il est reconnu que, pour les petites distances en ville, le vélo est le véhicule le plus rapide, le moins cher et le moins polluant. Caen est-elle devenue une ville cyclable ?
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