Atlas Social de Caen

De l'agglomération à la métropole ?

Les jardins collectifs de l’agglomération caennaise : entre héritage ouvrier et renouvellement social

par Léna Jégat et Maxime Marie

planche publiée le 01 juin 2021

Les jardins collectifs regroupent plusieurs types de jardins : les jardins familiaux (ou lotissement de jardins souvent héritiers du modèle des jardins ouvriers), les jardins partagés (forme plus récente où les cultures sont collectives mais qui peut intégrer des lopins individuels) et parfois même les jardins d’insertion. En 1944, ces jardins collectifs représentaient plus de 134 hectares dans l’agglomération caennaise. Ils ne représentent plus aujourd’hui que 19 hectares : comme au niveau national, ils ont fortement diminué localement.

1La première carte intitulée « Surface et importance des cultures dans les jardins familiaux » présente la répartition actuelle des jardins collectifs dans l’agglomération de Caen. Les jardins familiaux (pour lesquels on dénombre près de 800 parcelles), plus nombreux dans la bande sud-ouest/nord-est, se distinguent par la forte part de surface cultivable qui est effectivement mise en culture (planches potagères et/ou serres). Cette distinction permet de questionner l’appropriation et le rapport aux jardins. Ainsi, deux modèles distincts peuvent être proposés.

Plusieurs modèles de jardins

2D’une part, le modèle d’agrément (38 % des jardins familiaux de l’agglomération) est caractérisé par des jardiniers présents sur des laps de temps longs (une demi-journée, voire une journée passée au jardin), notamment durant les mois d’été. Les activités sont diverses (repas, jeux, discussions et visites) et correspondent à un taux d’équipement très élevé (« ton jardin, c’est une résidence secondaire », entretien au Chemin Vert). Ces jardins font l’objet d’une mise en culture peu importante (moins de 50 % de la surface cultivable) et sont présents particulièrement en rive gauche de l’agglomération (Caen et Hérouville-Saint-Clair), là où de nouvelles formes de jardins ont été aménagées dans les années 1980 et 1990 (ensemble de jardins familiaux paysagers de forme octogonale ou circulaire, surface inférieure à 150 ou 200 m²).

3D’autre part, le modèle vivrier (56 % des jardins familiaux de l’agglomération) est caractérisé par des jardiniers présents sur des laps de temps plus courts (quelques heures par semaine, surtout au printemps et en été). Le temps passé se limite au jardinage et à quelques discussions avec les autres jardiniers, les jardins sont limités à la seule fonction potagère. Ces derniers font l’objet d’une mise en culture très importante (au moins la moitié de la surface cultivable) et sont présents dans les communes du sud et de l’est de l’agglomération (large surreprésentation à Mondeville). Les parcelles restantes (6 %) ne témoignent d’aucune mise en valeur au moment des prises de vue des images aériennes.

4Une enquête par questionnaire réalisée en 2019 auprès de 165 jardiniers montre l’importance de la production alimentaire. Plus de 68 % d’entre eux la considèrent comme leur première motivation. Les jardins familiaux sont donc primordiaux pour l’économie domestique des ménages qui en bénéficient.

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Carte : Léna Jégat, 2019

Surface et importance des cultures dans les jardins familiaux

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Graphique : L. Jégat, 2019

Première motivation des bénéficiaires de jardins familiaux

Des profils sociaux géographiquement différenciés

5La deuxième carte présente l’importance des jardiniers en fonction des quartiers. Majoritairement retraités, ces derniers sont présents sur l’ensemble de l’agglomération, avec une surreprésentation sur un axe sud-ouest/nord-est (de Fleury-Sur-Orne à Colombelles), au sein duquel le cas de Mondeville est notable. Malgré le changement social en cours, les jardiniers appartiennent toujours dans leur majorité aux catégories populaires (75 % des 165 jardiniers enquêtés appartiennent aux catégories des ouvriers et des employés, qu’ils soient en retraite ou non), ce qui se traduit par la surreprésentation des bénéficiaires résidant en logement collectif (70 %) et dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (26 % des jardiniers, particulièrement dans les jardins familiaux d’Hérouville-Saint-Clair et de Cormelles-Le-Royal).

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Carte : Léna Jégat, 2019

Nombre de jardiniers et proportion des ménages bénéficiaires d’un jardin familial par IRIS

6Loin d’être homogène, l’image des jardins familiaux est aujourd’hui de plus en plus construite autour des fonctions d’agrément et de détente par les collectivités locales. Cet élément entre en contradiction avec les observations réalisées dans l’agglomération caennaise, où la fonction alimentaire reste essentielle pour beaucoup de ménages qui bénéficient d’une parcelle de jardin familial.

Pour citer ce document

Léna Jégat et Maxime Marie, 2021 : « Les jardins collectifs de l’agglomération caennaise : entre héritage ouvrier et renouvellement social », in Atlas Social de Caen [En ligne], ISSN : 2779-654X, mis à jour le : 01/06/2021, URL : https://atlas-social-de-caen.fr:443/index.php?id=765, DOI : en attente.

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Bibliographie

Caillavet F., Nichèle V., 1999, Autoconsommation et jardin. Arbitrage entre production domestique et achats de légumes>, Économie rurale, n°250, pp. 11-20, https://doi.org/10.3406/ecoru.1999.5071

Jégat L., 2019, L'autoproduction alimentaire dans les jardins familiaux de l'agglomération caennaise, mémoire de master 1 encadré par Marie M., Université de caen Normandie, 233 p., https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02307352

Marie M., Estimation de la contribution de la production potagère domestique au système alimentaire local, Vertigo – la revue électronique en sciences de l’environnement, n°20, 22 p. https://doi.org/10.4000/vertigo.26215

Pourias J., Daniel A.C., Aubry C., 2012, La fonction alimentaire des jardins associatifs urbains en question, POUR, n°215-216, pp 333-347,

https://doi.org/10.3917/pour.215.0333

Weber F., Pluvinage M., 1992, Les jardins populaires : pratiques culturales, usages de l’espace, enjeux culturels, Ministère de la Culture, 211 p.

Index géographique

Résumé

Les jardins collectifs regroupent plusieurs types de jardins : les jardins familiaux (ou lotissement de jardins souvent héritiers du modèle des jardins ouvriers), les jardins partagés (forme plus récente où les cultures sont collectives mais qui peut intégrer des lopins individuels) et parfois même les jardins d’insertion. En 1944, ces jardins collectifs représentaient plus de 134 hectares dans l’agglomération caennaise. Ils ne représentent plus aujourd’hui que 19 hectares : comme au niveau national, ils ont fortement diminué localement.

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