Atlas Social de Caen

De l'agglomération à la métropole ?

Changement climatique à Caen : constat actuel et perspectives

par François Beauvais, Olivier Cantat et Philippe Madeline

planche publiée le 20 septembre 2021

Avec près de 40°C le 25 juillet 2019 (39,8°C), Caen établissait un nouveau record absolu de chaleur, effaçant des tablettes le précédent établi lors de la canicule de 2003 (38,9°C). Cet événement météorologique extrême pourrait apparaître de façon plus récurrente dans les prochaines décennies. Il convient donc d’en anticiper les conséquences possibles dès à présent.

1La Normandie doit son climat tempéré à une exposition dominante aux masses d’air en provenance de l’Atlantique. Cette caractéristique océanique explique des temps très variables d’un jour à un autre, avec une ambiance généralement fraîche en hiver et douce en été, des précipitations tout au long de l’année mais plus durables et abondantes de l’automne à l’hiver. À Caen, ces principaux caractères régionaux sont nuancés par une position d’abri à l’arrière des collines du Bocage normand et la proximité de la mer. De ce fait, le froid comme la chaleur y sont moins prononcés que dans les terres mais plus que sur le littoral : il ne gèle en moyenne que 32 jours par an (contre 59 à l’Oudon et 19 à Port-en-Bessin) et le seuil de 25°C n’est dépassé qu’à 23 reprises, principalement entre juin et septembre (contre 34 à l’Oudon et 6 à Port-en-Bessin). Ici, il pleut nettement moins et plus rarement que sur les hauteurs calvadosiennes (740 mm répartis sur 126 jours à Caen, contre 1 307 mm en 163 jours au Gast et 1 007 mm en 145 jours à St-Georges-d’Aunay). Comme partout en Normandie, les cumuls peuvent fluctuer du simple au double entre les années marquées par de profondes sécheresses (jusqu’à moins de 500 mm, comme en 1989 avec 455 mm) et celles aux épisodes pluvieux longs et récurrents (près de 1 000 mm, comme en 1994 avec 987 mm).

Un climat qui change rapidement

2Mais le climat, que l’on croyait immuable, change rapidement en lien avec le réchauffement du système climatique planétaire d’origine anthropique, sans précédent depuis des décennies voire des millénaires selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Ce réchauffement est perceptible à Caen. La température a augmenté de + 0,8°C entre les deux Normales successives 1951-1980 et 1981-2010. Les hivers sont plus doux (environ 10 jours de froid en moins), tandis que les étés sont plus chauds (environ 10 jours de chaleur de plus). Et la hausse de la température se poursuit : la moyenne des neuf dernières années (2011-2019) est de 11,7°C, soit 1,3°C au-dessus de la Normale 1951-1980 (10,4°C) et déjà 0,5°C au-dessus de celle établie sur 1981-2010 (11,2°C). Pour les précipitations, le cumul annuel moyen est en augmentation (de 709 à 740 mm) mais aucune tendance significative n’est statistiquement démontrée, du fait de la très forte variabilité interannuelle. Ces variations de la pluviométrie, habituelles sous notre climat, semblent moins prononcées depuis le début du 21e siècle. La dernière année à moins de 600 mm remonte à 1996 et la dernière à plus de 900 mm à l’an 2000.

Plusieurs scénarios pour l’avenir

3Pour le futur, le climat de Caen est imaginable à partir de modèles climatiques régionaux s’appuyant soit sur un scénario « optimiste » (RCP 2.6 : réduction des émissions de gaz à effet de serre), soit sur un scénario « pessimiste », a priori plus probable (RCP 8.5 : accroissement continu des émissions de polluants atmosphériques). Si des efforts drastiques ne sont pas consentis à l’ échelle mondiale pour émettre moins de gaz à effet de serre, l’agglomération caennaise pourrait connaître diverses conséquences pour la santé et le bien-être (canicules) ; la biodiversité (disparitions d’espèces) ; la ressource en eau, tant en quantité (déficit) qu’en qualité (progression du biseau salé) ; les rendements agricoles (stress hydriques et thermiques, modification des stades phénologiques, prolifération des ravageurs, extension des maladies) ; l’économie (volatilité des prix, coût de la gestion des crises) ; submersions marines (hausse du niveau des mers).

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Graphique : Beauvais F., Mellet C.

Évolution de la température moyenne annuelle de 1950 à 2100

Sans politique climatique à l’échelle mondiale, une hausse conséquente des températures pourrait avoir lieu à Caen avec environ 3,6°C de plus d’ici 2100. En revanche, si des efforts très importants sont consentis pour diminuer les gaz à effet de serre (application de l’accord de Paris), l'augmentation des températures serait moins forte (environ 1°C).

Des solutions locales : de nouveaux aménagements

4La mise en place d’une adaptation à l’échelle du territoire semble indispensable de façon à limiter les effets négatifs des changements climatiques à venir. Des leviers existent. En ville, les nouveaux aménagements devraient être pensés de façon à intégrer davantage de surfaces végétales pour rafraîchir l’air et réduire ainsi les nuisances des îlots de chaleur. La forme, l’agencement et les matériaux des bâtiments seraient également à prendre en compte, tout en favorisant ceux moins consommateurs en énergie. Il conviendrait également de freiner l’étalement urbain sur les sols agricoles à fortes potentialités agronomiques, les plus à même d’atténuer les pertes de production lors des sécheresses. Cette logique devrait également s’appliquer au milieu littoral où le risque de submersion devrait sensiblement augmenter. L’agriculture pourrait s’adapter par l’introduction de variétés ou de cultures tolérantes au climat de demain, tout en favorisant les pratiques agricoles durables.

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Graphiques : Beauvais F., Mellet C.

Comparaison du diagramme ombrothermique de Caen entre 1981-2010 et 2071-2100 pour deux scénario RCP du GIEC

Sans politique climatique à l’échelle mondiale, le volume global des précipitations baisserait d’environ 16 %. La réduction serait particulièrement conséquente sur certains mois de l’année (début du printemps, été et début d’automne), pouvant entraîner des sécheresses et des pénuries d’eau. Pour l’hiver, les tendances sont plus incertaines.

Pour citer ce document

François Beauvais, Olivier Cantat et Philippe Madeline, 2021 : « Changement climatique à Caen : constat actuel et perspectives », in Atlas Social de Caen [En ligne], ISSN : 2779-654X, mis à jour le : 20/09/2021, URL : https://atlas-social-de-caen.fr:443/index.php?id=864, DOI : https://doi.org/10.48649/asdc.864.

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Bibliographie

Beauvais F., Cantat O., Madeline P., Le Gouée P., Brunel-Muguet S., Medjkane M., 2019, Quelles conséquences du changement climatique sur le blé tendre en Normandie aux horizons 2050 et 2100 ? Étude d’impact prospective à partir du modèle ALADIN-Climat, Climatologie, 16, pp 129-160, https://doi.org/10.4267/climatologie.1414

Cantat O., 2014, "Le climat de Basse-Normandie". Actes des Journées de climatologie de Caen 13-15 mars 2014, "Les extrêmes du temps et du climat : caractérisation et conséquences", CNFG, Commission Climat et société

Cantat O., 2006, "Les 'caprices' du climat en Normandie. La variabilité des températures et ses conséquences dans une région 'temprée' non dénuée d'excès," Actes des journées de climatologie 23-25 mars 2006, Les apports du géographe-climatologue, CNFG, Commission Climat et Société, pp 83-104.

DREAL de Normandie., 2020, Profil environnemental de Normandie. Partie climat, 94 p.

Trzpit J-p., 1970, "Climat. Chapitre B4" in Atlas de Normandie, Caen, Association pour l'Atlas de Normandie

Index géographique

  • Port-en-Bessin
  • Saint-Georges-d’Aunay

Clément Mellet

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Clément Mellet

Résumé

Avec près de 40°C le 25 juillet 2019 (39,8°C), Caen établissait un nouveau record absolu de chaleur, effaçant des tablettes le précédent établi lors de la canicule de 2003 (38,9°C). Cet événement météorologique extrême pourrait apparaître de façon plus récurrente dans les prochaines décennies. Il convient donc d’en anticiper les conséquences possibles dès à présent.

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